Certains dirigeants sont exaspérés par leur personnel. Pourtant, la qualité des relations sociales est un élément clé.
Être employeur dans une PME aujourd’hui n’est pas une partie de plaisir. Alors que les charges salariales augmentent sans cesse, le patron doit faire face à des défis de plus en plus importants. Il peut se trouver démuni face à ses responsabilités sociales. Paradoxalement, le droit du travail, qui a pour but notamment de protéger les travailleurs, peut mettre à mal les relations humaines et fragiliser l’entreprise.
Dans une petite structure, tout élément venant perturber le fragile équilibre humain peut se transformer en véritable cauchemar. Or, le rapport au travail a changé : la jeune génération privilégie un meilleur équilibre de vie tout en recherchant un environnement professionnel stimulant et varié.
Lorsqu’un travailleur décide de faire un break, pour faire un tour du monde, par exemple, ou pour se consacrer à un projet familial, cela vient forcément impacter le reste de l’équipe, surtout lorsque celle-ci est réduite. En outre, un congé parental allant jusque douze mois peut être obtenu pour chaque enfant tant qu’il n’a pas atteint l’âge de douze ans (et même vingt et un ans s’il souffre d’une incapacité physique ou mentale).
Plus inquiétant, le niveau d’absentéisme pour cause de maladie atteint un niveau inédit dans notre pays. Près de 6,13 % des jours ouvrés ont été « perdus » pour cause d’absentéisme en 2021, un record. Si ce chiffre a sans doute été impacté par le Covid, il était déjà à un niveau inquiétant (supérieur à 5 %) en 2019 et 2020.
Lorsqu’il s’agit d’absences de courte durée, l’employeur est doublement pénalisé car il assume le salaire garanti (un mois pour les employés, sept jours pour les ouvriers). Les maladies de longue durée, souvent liées au stress (burn-out…) sont un autre fléau pouvant ébranler une petite structure car elles sont imprévisibles et donc impossibles à planifier.
Dans le contexte actuel de « guerre des talents » qui sévit dans de nombreux secteurs, le rapport de force s’est inversé. Il n’est pas rare de voir l’employé, encadré par son syndicat, maîtriser mieux les astuces du droit social que l’employeur qui n’a pas le temps d’approfondir le sujet.
On observe alors une relation sociale étonnante : le patron se plie en quatre pour séduire et choyer son personnel. La crainte de voir partir les bons éléments peut d’ailleurs le freiner à investir dans leur formation, puisqu’ils pourraient aisément monnayer leur expertise fraîchement acquise.
Il ne faut donc pas s’étonner que certains dirigeants de PME se découragent. Ne bénéficiant eux-mêmes que d’une protection sociale réduite, ils sont fatigués de devoir suppléer aux carences de leurs employés et vivent cette situation comme une injustice. Ce découragement peut évoluer en exaspération et conduire à une décision de céder la société. Triste constat !
La qualité du climat social, construit au fil du temps, prend toute son importance au moment de la cession. Lorsque les employés, tenus à l’écart des discussions pour cause de confidentialité, apprennent la nouvelle, ils sont souvent inquiets, trop inquiets même. Ils craignent pour leur avenir, tandis que le repreneur souhaite justement maintenir l’équipe en place.
Il conviendra donc de bien communiquer, au bon moment, avec clarté et conviction.
Il n’en reste pas moins que le personnel n’a rien demandé et subit donc le changement. Celui-ci n’aura d’autre choix que de s’adapter au nouveau style de management. Le repreneur devra alors faire preuve d’écoute, de patience et de psychologie. Il devra tenter de trouver l’un ou l’autre allié dans le personnel et progressivement gagner leur confiance afin de fédérer l’équipe autour de son projet.
Article de M. Tanguy della Faille